Citer un proverbe dont on peut se dire de manière à peu près certaine qu’il est un mot d’auteur est agréable, mais cela fait appel à de nombreuses précautions !…
En savoir plus sur les précautions à prendre
Phénomène fréquent : les auteurs s’inspirent les uns les autres.
Jean de La Fontaine est le premier à avoir reconnu que ses fables s’inspiraient non seulement des fables de Phèdre (poète latin, vers 18-50), mais, avant eux, de celles d’Ésope (VIIe-VIe siècle avant J.-C.), par exemple.
Phénomène tout aussi fréquent : les auteurs de proverbes s’inspirent de proverbes populaires avant de les “immortaliser” sous telles formes sous leurs plumes… Parfois, ils ont repris le travail écrit d’anonymes qui les avaient collectés avant eux.
(Ainsi, les proverbes de l’Orient archaïque ont été colportés par les chanteurs ambulants de l’époque. L’un deux les transcrivit, sans même y apposer son nom. Puis, en bout de chaîne, Hésiode, poète grec du VIIIe siècle avant J.-C., les a inclus dans son œuvre Les travaux et les jours…)
D’autres fois, la relation entre auteur et parole du peuple est encore plus étroite : on sait que les fables d’Ésope n’ont été recueillies par écrit qu’à partir du IVe siècle av. J.-C.. Au cours de deux siècles entiers, qui les aura remaniées oralement ?
Enfin, certains proverbes sont parfois attribués à des auteurs de façon trop hâtive.
C’est par exemple le cas de Il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier fréquemment accordé à Cervantès, ou de L’appétit vient en mangeant souvent attribué à Jacques Amyot alors que Rabelais avait utilisé l’expression plus de 30 ans auparavant.
Cette rubrique tâche d’exclure les dictons, les maximes, les nombreuses citations. Elle ne donne que quelques exemples de « proverbes dans le texte » et ne prétend pas avoir recensé tous les proverbes qui viennent d’auteurs de façon attestée.
Elle est au contraire une des rubriques les plus évolutives du site et nous vous invitons à y participer en bas de page, mais en tenant compte des précautions énoncées, s’il vous plaît.
Certains vers de La Fontaine se sont modifiés avant de devenir proverbes…
La plupart de ces proverbes sont tirés de Pantagruel et Gargantua (1534 et 1535). Nous n’avons traduit que les plus célèbres en français moderne. Nous en avons trouvé d’autres seulement dans leurs versions utilisées de nos jours.
Voir des proverbes de Rabelais en vieux français
• A cul de foyrard [qui a la diarrhée] tousjours abonde merde (G, 9)
• De bon vin on ne peult faire maulvais latin (G, 19)
• Lever matin n’est poinct bon heur, boire matin est le meilleur (G, 21)
• Oignez [flattez] villain, il vous poindra [piquera] ; poignez villain, il vous oindra (G, 32)
• De la pance vient la dance (G, 32)
• La Penthecoste ne vient foys qu’elle ne me couste [me coûte à chaque fois] (P, 11)
• Qui boit en mangeant sa souppe, quand il est mort, il n’y voit goutte (P, 12)
• Quand le soleil est couché, toutes bestes sont à l’ombre (P, 12)
• Aulcunes foys [quelquefois] nous pensons l’un, mais Dieu faict l’aultre (P, 12)
• Il faict bon veoir vaches noires en boys bruslé quand on jouist de ses amours (P, 12)
• Est-il mal de dens plus grand que quand les chiens vous tenent [tiennent] aux jambes ? (P, 14)
• Faulte [manque] d’argent, c’est douleur non pareille (P, 16)
• Veit-on [vit-on] jamais femme belle qui aussi ne feust [qui ne fût pas non plus] rebelle ? (P, 21)
• Au bout de l’aulne [mesure d'environ 1,20 m] fault [manque] le drap (P, 33)
• Oncques [jamais] vieil cinge ne feit [fit] belle moue (III, pr)
• Qui au soir ne laisse levain, ja [jamais] ne fera au matin lever paste (III, 3)
• Patenostres et oraisons
• Sont pour ceulx la qui les retiennent
• Un fiffre allans en fenaisons
• Est plus fort que deux qui en viennent (III, 6)
• Se mocque qui clocque [boite] (III, 24)
• Un fol enseigne bien un saige [sage] (III, 37)
• On dict, en proverbe commun, heureux estre le medicin qui est appellé sur la déclination [déclin] de la maladie (III, 41)
• Maille à maille est faict le aubergeon [petite cotte de mailles] (III, 42)
• A faire la gueule d’un four sont trois pierres nécessaires (IV, pr)
• A l’enfourner on faict les pains cornuz (IV, 1)
• Il ne feut oncques [jamais] tel mariage qu’est de la poyre et du fromaige (IV, 9)
• Fol est qui se couvre d’un sac mouillé (IV, 50)
• De jeune hermite, vieil diable (IV, 64)
• Lever à cinq, dipner à neuf
• Soupper à cinq, coucher à neuf
• Fait vivre d’ans nonante neuf (IV, 64)
• Le mal temps passe et retourne le bon pendent qu’on trinque autour de gras jambons (IV, 66)
• Le dangier passé est le sainct mocqué (IV, bd)
Tous sont tirés des Essais, parus entre 1580 et une édition posthume de 1595. Proverbes ou maximes, en l’occurrence ?
Beaucoup d’entre eux sont à peine connus, peu sont utilisés…
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